A toutes les mères d'ados ! (Octobre 2024)

Voici un texte très fort sur l'adolescence, dont toutes les mères devraient avoir connaissance.
"Maman,
Ce conflit dans lequel nous sommes maintenant, j’en ai besoin. J’ai besoin de ce combat. Je ne peux pas l’expliquer parce que je n’ai pas le vocabulaire pour le faire et parce que, de toute façon, ce que je dirais n’aurait pas de sens. Mais j’ai besoin de ce combat. Désespérément.
J’ai besoin de te détester pour le moment, et j’ai besoin que tu y survives. J’ai besoin que tu survives au fait que je te haïsse et que tu me haïsses.
J’ai besoin de ce conflit, même si je le hais. Peu importe ce sur quoi nous sommes en conflit : heure du coucher, les devoirs, le linge sale, ma chambre en désordre, sortir, rester à la maison, partir de la maison, ne pas partir, la vie de famille, petit(e) ami(e), pas d’amis, mauvaises fréquentations. Peu importe. J’ai besoin de me battre avec toi au sujet de ces choses et j’ai besoin que tu t’opposes à moi en retour.
J’ai désespérément besoin que tu tiennes l’autre extrémité de la corde. Que tu t’y accroches fermement pendant que je tire de mon côté, que je tente de trouver des appuis dans ce nouveau monde auquel je sens que j’appartiens.
Avant, je savais qui j’étais, qui tu étais, qui nous étions. Mais maintenant, je ne sais plus.
En ce moment, je cherche mes limites et, parfois je ne peux les trouver qu’en te poussant à bout. Repousser les limites me permet de les découvrir. Alors je me sens exister, et pendant une minute je peux respirer.
Je sais que tu te rappelles l’enfant doux que j’étais. Je le sais, parce que cet enfant me manque aussi et, parfois, cette nostalgie est ce qu’il y a de plus pénible pour moi.
J’ai besoin de ce combat et de constater que, peu importe combien terribles ou exagérés sont mes sentiments, ils ne nous détruiront ni toi ,ni moi. Je veux que tu m’aimes même quand je donne le pire de moi-même, même quand il semble que je ne t’aime pas. J’ai besoin maintenant que tu t’aimes toi et que tu m’aimes moi, pour nous deux.
Je sais que ça craint de ne pas être aimé et d’être étiqueté comme étant le méchant. Je ressens la même chose à l’intérieur mais j’ai besoin que tu le tolères et que tu obtiennes de l’aide d’autres adultes. Parce que, moi, je ne peux pas t’aider pour le moment. Si tu veux te réunir avec tes amis adultes et former un « groupe de soutien pour survivre à la fureur de votre adolescent », c’est ok pour moi. Ou parler de moi derrière mon dos, je m’en fiche. Seulement ne m’abandonne pas. N’abandonne pas ce combat. J’en ai besoin.
C’est ce conflit qui va m’apprendre que mon ombre n’est pas plus grande que ma lumière. C’est ce conflit qui va m’apprendre que des sentiments négatifs ne signifient pas la fin d’une relation. C’est ce conflit qui va m’apprendre à m’écouter moi-même, quand bien même cela pourrait décevoir les autres.
Et ce conflit particulier prendra fin. Comme tout orage, il se calmera. Et je vais l’oublier, et tu l’oublieras. Et puis il reviendra. Et j’aurai besoin que tu t’accroches de nouveau à la corde. J’en aurai besoin encore et encore, pendant des années.
Je sais qu’il n’y a rien de satisfaisant pour toi dans ce rôle. Je sais que je ne te remercierai jamais probablement pour ça, ou même que je ne reconnaîtrai jamais le rôle que tu as tenu. En fait, pour tout cela, je vais probablement te critiquer. Il semblera que rien de ce que tu ne fais ne soit jamais assez. Et pourtant, je m’appuie entièrement sur ta capacité à rester dans ce conflit. Peu importe à quel point je m’oppose, peu importe combien je boude. Peu importe à quel point je m’enferme dans le silence.
S’il te plaît, accroche-toi à l’autre extrémité de la corde. Et sache que tu fais le travail le plus important que quelqu’un puisse faire pour moi en ce moment.
Avec amour, ton adolescent"

Source/Letting Go: A Parents' Guide to Understanding the College Years de Karen Levin Coburn et Madge Lawrence Treeger

Redonner du sens et de la valeur à la parole de nos ados. (juin 2023) 

Praticienne en psychothérapie depuis plus de dix ans, je suis effarée de l'évolution du mal être et de la tentation du suicide chez les pré-ados et adolescents. 

En échangeant avec une sophrologue de la région, nous avons constaté à quel point le sentiment de démission avait envahi nos esprits, adultes comme enfants. Démission de l'Etat sur tant de sujets vitaux dont la santé, l'enseigne-ment, les droits à la liberté individuelle... et collective avec l'Environnement.

Démission au niveau de l'éducation de plus en plus confrontée à la violence : des enseignants souvent submergés d'injonctions contradictoires avec le bien être de leurs élèves (et du leur), des parents épuisés, impuissants face à la pression des écrans, aux comportements de plus en plus en tension de leurs enfants. Et au bout de cette chaîne de la démission, celle de nos jeunes, qui trouvent souvent refuge dans le virtuel et se laissent aller de plus en facilement à démissionner de leur vie, de la vie, comme s'ils zappaient une vidéo sur Insta.

Psy confinée au bord de la crise de nerf (avril 2020)


FRUSTRATION AU 18e JOUR DE CONFINEMENT

Depuis bientôt dix ans je pratique mon métier en milieu rural avec passion, cœur et oreille tendus entièrement réceptifs à la personne assise en face de moi, comme ces immenses coupoles tournées vers l’espace qui captent la moindre émission d’un signal cosmique. Cette tension parfois extrême vers l’autre, pour saisir un souffle, une ébauche d’expression, toute cette mobilisation à la fois émotionnelle (capable de tout entendre), intellectuelle (des années d’études et toute une vie d’expériences), et intuitive, est au service de… personne depuis 18 jours.
Ailleurs en France et dans le monde, c’est le chaos. Monte un sentiment d’inutilité, où pointe de la honte, vis-à-vis de ceux qui sauvent des vies au péril de la leur et même de ma famille, tous cloîtrés à Paris, quand je suis « tranquillement à la campagne dans mon jardin où tout va bien pour moi ». J’ai dit ma disponibilité partout, en face à face ou en ligne, sur les réseaux sociaux, auprès des voisins, des mairies des villages environnants, des hôpitaux régionaux, administrations, plateformes et centres d’écoute nationaux etc. Mais rien, peut-être parce que je suis psychopraticienne et non psychologue. Entre autre diplômée de la Faculté de médecine Paris Sud (D.U Deuil), je confine en faisant le deuil de mon sentiment d’utilité… mais en vous disant quand même que JE PEUX AIDER !
03 avril 2020

L'EFFET MONTE CHARGE DU CONFINEMENT

Voilà cinq peut-être six semaines que nous sommes confinés et j'entends, j'observe que des tensions éclosent dans les foyers. Même ici, en pleine nature, qui nous a protégé un temps. Des cris ou des pleurs mais des émotions qui, si on les écoute, semblent remonter de nul part comme un trop plein qui déborde. Poussées par l'ennui et amplifiées par le doute/l'inquiétude sur ce que nous pourrons faire demain, des charges émotionnelles du passé remontent à la surface de notre conscience. Nous pouvons être surpris, déroutés. Mais les plus démunis sont certainement les adolescents et jeunes adultes qui sont déjà pris dans les contradictions, les méandres psychologiques du passage de l'enfant à l'adulte. Pour la plupart habitués à faire diversion de leurs émotions, à être "fort" face aux potes, aux profs, aux parents, ils peuvent se sentir extrêmement fragilisés, perdus dans ce temps qui s'étire en longues boucles et les met face à eux-même et leurs blessures sans qu'ils aient encore élaboré les moyens d'y faire face. Le temps du confinement n'est pas le temps des vacances, il brasse certains d'entre nous plus profondément.
20 Avril 2020

PLUS D'AMOUR MOINS DE DEVOIRS

Oui, on nous le répète assez, l'écart peut se creuser scolairement avec l'école à la maison. Mais je pense qu'un enfant qui se sent entouré, aimé pour ce qu'il est (et non l'enfant qu'il devrait être), engrange tellement de confiance en lui qu'il sera capable de rattraper un retard scolaire de quelques semaines. Je le vois dans mon cabinet, et à la maison avec mon ado, la pression peut être bien plus forte qu'on ne l'imagine sur nos enfants, et la pente glissante. Eux aussi perçoivent l'angoisse de l'avenir général qui se cumule au leur. Ils réagissent à leur façon, pas toujours compréhensible pour les adultes. Pendant cette période de tension dans nos quotidiens, il me semble qu'en instruisant nos enfants de notre amour et en lâchant un peu la bride des "devoirs", ils n'en seront que plus forts à la rentrée.
21 avril 2020